Pour la première fois depuis la création du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, en 2006, un Suisse en assurera la présidence. L’élection de Jürg Lauber, ambassadeur suisse auprès de l’ONU à Genève, a eu lieu le 9 décembre 2024, marquant une étape significative pour la Confédération. Ce poste prestigieux conféré à un diplomate helvétique est un honneur, mais aussi une mission complexe dans un contexte international marqué par des tensions croissantes et des défis pour la défense des droits humains. La personnalité de Jürg Lauber, son parcours et sa vision joueront un rôle central dans la conduite de cette mission.

Jürg Lauber : un diplomate chevronné au service des droits humains
Âgé de 61 ans et originaire de Zoug, Jürg Lauber incarne la rigueur et la discrétion propre à la tradition diplomatique suisse. Avec une carrière de plusieurs décennies dans le service diplomatique helvétique, il est reconnu pour sa capacité à naviguer avec finesse dans des environnements complexes et multilatéraux. Avant d’être nommé ambassadeur auprès de l’ONU à Genève, il a occupé des fonctions clés, notamment celle de représentant permanent de la Suisse auprès des Nations unies à New York.
L’élection par acclamation le 9 décembre 2024, à Genève, reflète l’estime dont il bénéficie auprès des États membres. Aucun des pays du groupe régional de la Suisse n’a contesté sa candidature, un fait qui souligne le respect pour son expérience et son sens de la diplomatie. En assumant ce rôle, Jürg Lauber incarne également les valeurs suisses de neutralité, d’engagement humanitaire et de dialogue.
« C’est un grand honneur et une immense responsabilité, mais surtout une opportunité pour renforcer notre engagement au Conseil », a-t-il déclaré après son élection. Une déclaration qui traduit son ambition de redonner un espace à la diplomatie dans un Conseil trop souvent paralysé par des clivages politiques. La présidence de Jürg Lauber intervient à un moment critique pour le Conseil des droits de l’homme. L’organe onusien est régulièrement critiqué pour son inefficacité, la politisation de ses débats et les tensions entre ses membres. Les différents blocs régionaux – Afrique, Asie, Europe, Amériques – adoptent souvent des positions divergentes sur des questions fondamentales comme les droits des femmes, les minorités ethniques, ou encore les conséquences des conflits armés.
En tant que président, Jürg Lauber devra relever plusieurs défis :
- Promouvoir le dialogue dans un contexte de polarisation : Avec des tensions accrues entre grandes puissances, notamment les États-Unis, la Chine et la Russie, le Conseil est parfois perçu comme une arène de confrontation plutôt qu’un espace de dialogue constructif. La capacité de Lauber à maintenir un équilibre entre neutralité suisse et fermeté sur les principes fondamentaux sera déterminante.
- Redonner de l’efficacité au Conseil : Les mécanismes actuels, comme l’Examen périodique universel (EPU), souffrent de lourdeurs administratives et de limites politiques. Jürg Lauber devra encourager des réformes visant à renforcer la crédibilité et l’impact des résolutions adoptées.
- Répondre aux urgences mondiales : Les crises humanitaires, les violations massives des droits humains et les conséquences du changement climatique exigent des réponses rapides et concertées. La présidence suisse devra jouer un rôle moteur dans la mobilisation des États membres sur ces dossiers prioritaires.
- Rassurer la société civile et les ONG : Alors que certaines ONG accusent le Conseil d’être inefficace, voire complaisant envers certains régimes, Jürg Lauber devra rétablir un lien de confiance avec ces acteurs essentiels de la promotion des droits humains.
Un test pour la neutralité suisse
La Suisse est perçue comme un médiateur naturel grâce à sa neutralité. Cependant, cette posture pourrait être mise à l’épreuve dans un Conseil où les intérêts nationaux priment souvent sur les valeurs universelles. Jürg Lauber devra naviguer entre les attentes de la communauté internationale, la pression des grandes puissances et les principes fondés sur les droits fondamentaux.