Les imposteurs de l’IA : quand « journalistes » et « analystes » se mordent la queue

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By La rédaction

Ils se disent journalistes ou analystes. En réalité, ils sont devenus des opérateurs de machines, inondant l’espace médiatique d’articles et d’analyses générés par l’intelligence artificielle. Derrière cette production industrielle se cache une érosion inquiétante de la qualité de l’information et une perte de confiance irréversible pour les lecteurs.

Il y a encore quelques années, publier un article demandait un effort de recherche, de vérification, un minimum de courage intellectuel. Aujourd’hui, il suffit de quelques mots tapés dans un logiciel pour obtenir un texte prêt à être mis en ligne. Des médias comme CNET ont ainsi produit des dizaines d’articles entièrement rédigés par une IA, dont la majorité contenait des erreurs majeures. D’autres, comme le magazine allemand Die Aktuelle, sont allés jusqu’à inventer une interview de Michael Schumacher, provoquant un scandale retentissant.

Ce qui se déploie sous nos yeux n’est pas du journalisme, mais une machine à recycler des mots vides. Cette avalanche de contenus automatiques – que certains surnomment déjà « AI slop » – n’apporte aucune information nouvelle. Elle copie, mélange et régurgite ce qui existe déjà, parfois en déformant la réalité, souvent en introduisant de fausses données. Le cycle est infernal : ces textes finissent par nourrir les bases d’entraînement des IA, qui à leur tour produisent d’autres textes tout aussi creux. Comme un serpent qui se mord la queue, l’information se replie sur elle-même et s’appauvrit.

Les conséquences sont graves. La confiance envers les médias s’effrite. Les erreurs s’accumulent. Les lecteurs, incapables de distinguer le vrai du faux, se détournent des journaux pour se réfugier dans des bulles de désinformation encore plus opaques. Des études récentes montrent que la majorité des citoyens rejette l’idée que l’actualité puisse être « principalement » générée par l’IA, surtout lorsqu’il s’agit de politique ou de faits divers sensibles.

Face à cela, un principe simple devrait s’imposer : l’honnêteté. Publier un article écrit par une IA n’est pas en soi un crime, à condition de le dire clairement. Les médias qui se respectent commencent à encadrer cette pratique, à signaler la présence d’outils automatisés et à conserver une relecture humaine. Mais pour beaucoup d’éditeurs en quête de clics, la tentation est grande de taire cette réalité pour maintenir l’illusion d’un journalisme « produit par des experts ».

Ironie du sort : cet article fustigeant les imposteurs de l’IA a lui-même été rédigé… par une intelligence artificielle. Le serpent se mord la queue, une fois encore.

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