Alors que la guerre civile soudanaise entame sa troisième année, les cris d’alerte des humanitaires se heurtent à l’indifférence croissante de la communauté internationale. Le pays est aujourd’hui le théâtre de ce que les Nations unies qualifient de « pire catastrophe humanitaire au monde » (France 24, 15 avril 2025). Depuis avril 2023, le conflit entre l’armée régulière soudanaise (FAS) et les Forces de soutien rapide (FSR) a fait plus de 150 000 morts et déplacé 14 millions de personnes — un record mondial selon le Council on Foreign Relations.
Le pays s’enfonce dans le chaos : plus de 30 millions de Soudanais ont besoin d’aide humanitaire, la famine progresse, et les hôpitaux, souvent détruits ou hors d’usage, ne peuvent plus répondre à l’urgence sanitaire. Dans des camps de déplacés comme celui de Zamzam, qui abrite jusqu’à un million de personnes, la faim devient une arme de guerre. Médecins Sans Frontières rapporte avoir soigné plus de 12 000 victimes de violences, en majorité des femmes et des enfants (MSF, avril 2025). Pire encore, en février, des éléments des FSR auraient incendié une partie du camp, aggravant la crise alimentaire déjà catastrophique.
Le rôle trouble des Émirats arabes unis
Au cœur des accusations récentes : les Émirats arabes unis. Le gouvernement de Khartoum accuse ouvertement les EAU de soutenir les FSR en leur fournissant armes, financements, et un accès à la vente illégale d’or soudanais — une manne qui permet aux milices de poursuivre la guerre (Le Monde, 27 mars 2025). Un rapport d’experts onusiens publié début avril révèle des violations de l’embargo sur les armes, pointant notamment les Émirats comme acteurs clés du trafic vers le Darfour.
Le 10 avril, le Soudan a porté plainte contre les EAU devant la Cour internationale de justice, les accusant de complicité dans un « génocide » en cours au Darfour (Reuters, 10 avril 2025). Ces révélations jettent une ombre sur le rôle diplomatique que les Émirats prétendent jouer dans la région. Lors d’une conférence internationale à Londres le 15 avril, les divisions entre puissances arabes ont empêché toute déclaration commune. Tandis que les Émirats insistaient sur l’urgence d’une transition civile, l’Égypte et l’Arabie saoudite exigeaient d’abord un cessez-le-feu (Reuters, 16 avril 2025).
À ce jour, aucun consensus n’émerge, et le Soudan sombre. Des figures comme Mo Ibrahim appellent à l’envoi d’une force internationale pour protéger les civils et créer des couloirs humanitaires (Le Monde, novembre 2024). Mais en l’absence d’une volonté politique forte, les appels restent lettres mortes.