Tunisie : l’ONU dénonce la répression des opposants politiques

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By La rédaction

Genève, 18 février 2025 – Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme a exprimé une vive inquiétude face à l’intensification de la répression en Tunisie. Une vague d’arrestations massives touche militants, avocats, journalistes et figures de l’opposition politique, soulevant de graves préoccupations quant au respect des droits fondamentaux et des principes de l’État de droit dans le pays.

Selon Volker Türk, Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, ces détentions constituent « une violation manifeste des libertés fondamentales d’opinion et d’expression, pierre angulaire de toute société démocratique ». Il appelle les autorités tunisiennes à « mettre immédiatement un terme à ces persécutions et à respecter leurs obligations internationales en matière de droits humains ».

Les procès qui se profilent dans ce climat de tension suscitent des inquiétudes quant à leur équité. Plus de 40 opposants politiques seront jugés au début du mois de mars par le Tribunal de première instance de Tunis, parmi lesquels au moins sept sont en détention provisoire depuis février 2023. Ces individus sont accusés de « conspiration contre l’État » et d’infractions liées au terrorisme, tandis que certains exilés seront jugés par contumace. L’organisation Human Rights Watch a dénoncé des « accusations excessivement vagues », estimant qu’elles visent principalement à museler toute dissidence politique.

L’affaire « Instalingo », qui a abouti à des condamnations allant de 5 à 54 ans de prison pour 41 personnes, illustre les dérives de la justice tunisienne. Parmi les condamnés figurent des journalistes et blogueurs poursuivis pour « complot contre la sécurité de l’État » et « atteinte au Président de la République ». Le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme rappelle que « les garanties judiciaires et le droit à un procès équitable doivent être respectés en toutes circonstances ».

Parallèlement, la situation des prisonniers politiques devient de plus en plus alarmante. Plusieurs détenus ont entamé des grèves de la faim pour protester contre leur incarcération prolongée et les conditions de leur détention. Abderrazak Krimi, directeur de projet au Conseil tunisien pour les réfugiés, est entré dans sa troisième semaine de grève de la faim après son arrestation en mai dernier, accusé, avec le directeur de l’ONG Mustapha Djemali, d’avoir fourni un refuge à des migrants subsahariens en situation irrégulière.

Abir Moussi, avocate et présidente du Parti destourien libre, emprisonnée depuis octobre 2023 et poursuivie dans cinq affaires dont deux liées à la liberté d’expression, est également en grève de la faim depuis une semaine. Amnesty International a dénoncé « une répression politique ciblée » visant les figures de l’opposition.

Sihem Bensedrine, 75 ans, ancienne présidente de l’Instance vérité et dignité, reste incarcérée après la prolongation de sa détention de quatre mois le mois dernier. Son état de santé préoccupant l’a contrainte à être hospitalisée après deux semaines de grève de la faim. La Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) a exprimé sa « profonde préoccupation quant à l’acharnement judiciaire et l’instrumentalisation de la justice contre les défenseurs des droits humains en Tunisie ».

Face à cette situation, le Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme demande la libération immédiate de toutes les personnes détenues arbitrairement et appelle les autorités tunisiennes à garantir la transparence et l’indépendance du système judiciaire. Il exhorte également à la libération, pour raisons humanitaires, des prisonniers âgés et en mauvaise santé. Dans son communiqué, Volker Türk insiste : « La Tunisie, berceau du Printemps arabe, doit rester un pays où les citoyens peuvent exprimer librement leurs opinions sans crainte de représailles. Il est impératif que les autorités revoient leur législation pénale pour la mettre en conformité avec les normes internationales des droits humains ».

La communauté internationale suit de près cette situation, et plusieurs organisations non gouvernementales appellent l’Union européenne et les Nations Unies à exercer une pression diplomatique accrue sur Tunis pour garantir le respect des droits fondamentaux et mettre fin aux dérives autoritaires.

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